«Le caractère antisémite de l'agression semble avéré», a expliqué jeudi Bernard Cazeneuve au sujet de l'attaque à Créteil d'un couple juif par deux hommes. Les auteurs de l'agression auraient invoqué la religion de leurs victimes pour justifier leur choix: «Ils pensaient qu'étant donné que ma famille est juive, les juifs, ça a de l'argent, c'est comme ça qu'ils l'ont dit, a raconté l'une des victimes à France Info, et en plus les Juifs ça ne met pas l'argent à la banque.». Une «raison» invoquée également par les agresseurs d'Ilan Halimi, jeune homme juif enlevé et torturé à mort en 2006 par le «gang des barbares» qui espérait une rançon de sa famille «supposée riche car juive».
• Préjugé historique. L'antisémitisme «économique» est une conséquence de l'antijudaïsme religieux: considéré comme le peuple «déicide» (pour avoir tué le Christ), les Juifs sont mis au ban de la société par les chrétiens. Comme le rappelle le sociologue Michel Wieviorka dans une interview à l'Obs: «au Moyen Age, les juifs ont souvent été, sinon expulsés, maltraités et confinés à des fonctions liées à l'argent, ce qui était mal considéré. Beaucoup travaillaient dans la banque. Ils ont alors commencé à subir des accusations de rapacité et d'avarice.». Mais c'est à l'orée du XIXème siècle, avec l'émergence du capitalisme industriel, que le cliché des Juifs et de l'argent s'affirme avec une nouvelle force. Les Juifs sont alors accusés d'être les promoteurs du capitalisme mondialisé. Le cliché se transforme en complot. L'historien Gerald Krefetz dans son livre Les juifs et l'argent: les mythes et la réalité, résume l'idée de l'antisémitisme économique en une phrase: «[les juifs] contrôlent les banques, la réserve monétaire, l'économie et les affaires — de la communauté, du pays, du monde».
Si le nouvel antisémitisme- ce que Pierre-André Taguieff appelle en France «nouvelle judéophobie»- qui se cache derrière le masque de l'antisionisme radical fait de nombreux adeptes, notamment dans les banlieues où se transposent le conflit israélo-palestinien, l'antisémitisme «à l'ancienne» reste tenace. On trouve par exemple dans les vidéos de Dieudonné et d'Alain Soral de nombreuses allusions à des liens entre la «communauté organisée» et les milieux d'affaires.
• Comment combattre ce préjugé? A l'Obs, l'auteur de L'antisémitisme expliqué aux jeunes insiste sur le rôle primordial de l'école pour lutter contre ces stéréotypes. «Comme il est difficile de convaincre les plus convaincus, les efforts doivent être fournis au plus tôt, dès l'école. Après, c'est trop tard.». Il conseille de doter les enseignants d'outils pédagogiques pour aborder ce sujet délicat.
Pour lutter contre ce préjugé, un Français Sasha Andreas a réalisé un documentaire «Jews got money» où il enquête sur la pauvreté dans la communauté juive à New-York, ou un Juif sur cinq vit sous le seuil de pauvreté. En France, où les statistiques ethniques sont interdites, il est impossible de déterminer le niveau de vie des Juifs. Mais les deux plus grandes communuatés juives se situent à Sarcelles et dans le XIXème arrondissement de Paris, quartiers plutôt populaires, où la population a plutôt un train de vie modeste.
«On a donc voulu démontrer ce qui semble pourtant évident: la pauvreté existe aussi dans cette communauté.» explique la productrice du film Anna Heim, à BFMTV. Le documentaire a connu des difficultés de diffusion en France et en Israël, que l'auteur explique par une «peur de la stigmatisation». Sur le blog «Les Juifs ont de l'argent», les auteurs du documentaire s'appliquent à faire la généalogie historique de ces préjugés et à les démonter.
http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2014/12/05/01016-20141205ARTFIG00297-les-juifs-et-l-argent-un-prejuge-tenace.php
http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2014/12/05/01016-20141205ARTFIG00297-les-juifs-et-l-argent-un-prejuge-tenace.php
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